Leda est une mère de quarante huit qui se retrouve seule après le départ de ses deux filles au Canada. Elle en profite alors pour s’octroyer des vacances sur la côte ionienne. Emportant ses livres et son travail de chercheuse universitaire, elle se pose chaque jour à la même place sur la plage. Elle est alors vite intriguée par la famille napolitaine qui s’installe à ses côtés. Bruyante, cette famille attire son attention et tout particulièrement la complicité entre Nina, une jeune femme, et sa petite fille Elena. Cette relation mère-fille fait écho à son propre passé, à son rôle de mère qu’elle n’a pas toujours bien tenu, aux sentiments contradictoires qu’elle éprouve pour ses filles, à la façon dont elle se voit en tant que femme.
Dans un tout autre style que L’amie prodigieuse, Elena Ferrante nous emmène dans les méandres de la pensée de cette femme torturée. Les phrases, courtes, simples, douces par moment et froides par d’autres, donnent au roman une puissance qui frappe le lecteur en plein cœur. Le cheminement psychologique de Leda, lui aussi, nous interpelle et nous interpelle sur la maternité, l’amour maternel, le rôle de la femme et la difficulté d’être mère. Un voyage dans le corps et l’âme féminins bouleversant.
J’ai aimé :
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Lire un autre roman d’Elena Ferrante et de découvrir une autre écriture, plus fluide.
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Ressentir l’illusion de m’immiscer dans la vie, l’intimité de Leda et découvrir ses secrets les plus profonds.
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Réfléchir sur le devoir que l’on s’impose d’être une mère parfaite
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Errer dans les pensées de Leda, passer des souvenirs au présent sans coupures, sans indications.
Un corps de femme fait mille choses différentes, il peine, court, rêve, invente, s’échine, et en même temps les seins grossissent, les lèvres du sexe se gonflent, la chair pulse d’une vie ronde qui est la nôtre, c’est notre vie, et pourtant elle nous pousse ailleurs, elle se détache de nous tout en habitant notre ventre, joyeuse et lourde, aimée comme une impulsion vorace, et pourtant repoussante comme la piqûre d’un insecte venimeux dans une veine.
-Je me suis résignée à vivre peu pour moi et beaucoup pour mes deux filles : petit à petit ?cela a bien marché-Alors ça passe, dit-elle.-Quoi? »Elle fit un geste qui indiquait un vertige mais aussi une sensation de nausée.« Le bouleversement. »Je me souvins de ma mère et dis:« Ma mère utilisait un autre mot, elle appelait ça le broyage. »Elle reconnut son sentiment dans ce mot et eut le regard d’une petite fille apeurée.« C’est vrai, ton cœur est broyé : tu n’arrives pas à supporter de rester avec toi-même et tu as certaines pensées que tu ne peux pas dire. »Puis elle me demanda à nouveau, cette fois avec l’expression douce de celle qui cherche une caresse:« Donc ça passe? »