Un regard d’enfant de 12 ans sur des événements marquants dans une bourgade au nord des Etats-Unis, qu’il relate 40 ans plus tard dans Montana 1948. David seul peut les raconter car nul ne peut prétendre avoir connus ces trois êtres mieux que moi. Ni de les avoir autant aimés.
Ces trois êtres sont son père, sa mère et Marie Little, la jeune servante indienne au service de cette famille. L’été 48, cette dernière, malade, refuse farouchement l’intervention du médecin du village, à savoir l’oncle du jeune garçon. Elle révèle alors un secret très lourd sur son comportement à l’égard des jeunes indiennes. Le père de David, quant à lui, est le shérif de la ville. Profondément soucieux de garantir la justice, il se veut d’intervenir. Malgré le fait que ce soit son frère et malgré l’opposition farouche – même armée – d’un père autoritaire et injuste. Son épouse le soutient et David assiste à tous ces tiraillements qui mènent jusqu’à un double drame et provoquent le départ de cette petite famille que rien ne destinait à quitter ses racines.
J’ai aimé trouver dans ce roman:
- la triste actualité de la question du port d’armes aux Etats-Unis
- la facilité de lecture grâce à une écriture très réaliste et efficace : on croirait voir un film
- le thème toujours présent aux USA du racisme à l’égard des noirs ou des indiens, vu sous un autre angle
- la psychologie familiale et ce regard sur la jalousie dans la fratrie (suscitée ici par le père), sur le poids des secrets de famille ou encore sur les pressions extérieures « en raison du rang ou du sang »
- la difficile confrontation de la loyauté envers les siens ou envers la justice
Une perle, facile de prime abord mais qui aborde tant de sujets qu’elle peut être mise entre toutes les mains – dès l’adolescence – pour mener à une réflexion personnelle ou de groupe nourrie par ce roman.
J’étais encore suffisamment petit pour imaginer, comme le croient tous les gamins, que quand les adultes sont absorbés par leurs affaires, les enfants deviennent invisibles. L’insistance de mon père me rendait mal à l’aise. Qu’attendait-il de moi ? Voulait- il que je donne mon avis ? J’étais bien le seul dans la pièce à ne pas en avoir. Avait- il oublié que j’étais un enfant, que je n’avais pas le droit de vote et oserait-il me mêler, comme cela, à cette histoire alors que je n’étais pas censé en connaître les faits principaux ?
Depuis ce jour-là, elle ne parla plus jamais de mon avenir. ma remarque était cruelle, mais moins encore que la vérité : après ce que j’avais vu étant enfant, je ne pouvais plus croire à l’exercice de la justice. Mon père, certes, avait poursuivi dans ce domaine ; j’attribuais cela à sa capacité à cloisonner sa vie en compartiments parfaitement séparés les uns des autres.