Une de mes résolutions pour 2020 : reprendre les causeries littéraires avec mes copines. Le concept est simple : on choisit un roman, on le lit pour une date précise (en essayant de ne pas reporter dix fois !) et ensuite on discute de notre expérience de lecture, des difficultés qu’on a pu rencontrer, des moments forts, des phrases ou passages qu’on a soulignés, des thématiques abordées ; puis on déborde et on parle de la vie. C’est ça aussi la magie de la lecture !
La barre était haute pour cette première lecture. Nous avions toutes adoré No home et il nous tardait de nous plonger dans le deuxième roman de Yaa Gyasi, Sublime Royaume.
Sublime Royaume
Gifty, une jeune femme afro américaine d’origine ghanéenne, se consacre essentiellement à ses recherches en neurologie sur l’addiction. L’arrivée de sa mère, dépressive, l’oblige à se replonger dans son passé. L’écriture de Gyasi suit le voyage de la pensée de Gifty et le lecteur est pris dans ces allers-retours vers l’enfance, l’adolescence et le début de l’âge adulte.
Notre lecture
Au début, nous sommes un peu perdues… Les transitions entre les différentes périodes de sa vie sont floues ; le personnage de Gifty semble vouloir nous repousser, comme elle le fait avec les personnes qui traversent sa vie ; nous avons des difficultés à appréhender ce que veut vraiment nous raconter ce roman. Le poids des souffrances, de la solitude de la jeune femme est palpable et s’en ressent à travers l’écriture puissante de l’auteure.
Et puis petit à petit, les pièces du puzzle s’assemblent, tout semble s’éclaircir, pour Gifty comme pour nous. On comprend alors que pour cette jeune femme, tout est matière à expérimentation, que ce soient ses pensées ou ses recherches scientifiques. On comprend l’introspection du rapport d’attachement et de distance entre elle et sa mère, un rapport rempli de silence et d’incompréhension. On comprend son besoin irrépressible de quête de sens : entre la religion et la science, son cœur balance. On comprend cette difficulté pour les enfants d’immigrés d’osciller entre leur pays d’adoption et leur pays d’origine, ne se sentant jamais complètement chez eux.
De nombreuses thématiques sont abordées dans ce roman captivant, celles du racisme, du féminisme, des relations familiales et de la transmission d’un héritage, de la religion et des limites de la science, du mystère de l’être humain… tant de thèmes qui se déclinent de différentes façons au fil du roman et qui permettent d’en faire des lectures particulièrement riches et contemporaines.
Autant No home prend directement une certaine ampleur historique et communautaire, autant ce deuxième roman démarre par un angle intime pour petit à petit élargir le prisme de l’individu vers le collectif. Il n’en reste pas moins puissant. Ce livre m’a également beaucoup fait penser à Américanah, un roman dont nous avions parlé il y a quelques années.
Toutes ces années de foi, à considérer le cœur, l’âme et l’esprit comme le moyen d’aimer le Seigneur tel que les Écritures nous l’enseignent, m’avaient conditionnée à croire dans le grand mystère de notre existence, mais plus je tentais de m’en approcher, plus il semblait s’éloigner. Le fait que je sois capable de reconnaître la partie du cerveau om est stockée la mémoire ne répond qu’au « où » et peut-être même au « comment ». Il n’explique guère le « pourquoi ». Cela m’avait toujours perturbée, et cela me perturbait encore.