Certaines créent un blog littéraire, d’autres un blog sur le racisme aux Etats-Unis…
Observations et billets d’humeur sont régulièrement postés par Ifemelu, une jeune femme africaine partie vivre aux States, attirée par le rêve ‘américanah’…Bien vite, elle a déchanté et compris que cette difficulté d’intégration est renforcée par sa négritude, perçue comme la dernière place au classement mondial des races. Ifmelu n’est pas seule à vivre cette désolation ; Onbize, son copain d’université au Nigeria en fait la même expérience en Angleterre et nous le suivons aussi.
Féministe engagée et romancière nigériane reconnue par le monde international des lettres, Ch. Ngozi Adichie pose la question de la race et du racisme dans un style enlevé, teinté d’humour caustique et empreint d’un sens du détail impressionnant. Elle nous met en situation de rencontres multiculturelles les plus diverses, tous milieux et toutes races confondues, sur un fond de campagne électorale d’Obama, premier noir à se présenter aux présidentielles. Son regard sur le continent africain est tout aussi aiguisé et incisif.
J’ai aimé :
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les posts – toujours intéressants, souvent impertinents – sur la société américaine qui se prétend ouverte et tolérante
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réfléchir avec Ifmelu à la question de l’identité qui ne se pose qu’une fois son pays ou son continent quitté
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la quête du Graal inaccessible de la société africaine bourgeoise et intellectuelle
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me mettre dans la peau d’Ifmelu et embrasser sa condition, le temps d’un livre
Deux femmes parlaient de leurs dons à un merveilleux organisme humanitaire qui forait des puits au Malawi, à une merveilleuse banque coopérative au Kenya. Ifemelu les observait. Il y avait une certaine notion de luxe attachée à la charité à laquelle elle ne pouvait s’identifier et qu’elle ne partageait pas. Considérer la « charité » comme allant de soi, savourer cette bienfaisance envers des gens qu’on ne connaissait pas –cela tenait peut-être au fait d’avoir possédé hier, de posséder aujourd’hui et de s’attendre à posséder demain. Elle les enviait.
Ils comprenaient tous la fuite devant la guerre, devant la pauvreté qui broyait l’âme humaine, mais ils étaient incapables de comprendre le besoin d’échapper à la léthargie pesante du manque de choix. Ils ne comprenaient pas que des gens comme lui, qui avaient été bien nourris,(…),mais étaient englués depuis leur naissance à regarder ailleurs,(…), étaient prêts aujourd’hui à commettre des actes illégaux, pour pouvoir partir, bien qu’aucun d’entre eux ne meure de faim, n’ait été violé, ou ne fuie des villages incendiés, simplement avides d’avoir le choix, avides de certitude.
Certaines femmes noires préféreraient se promener nues dans la rue plutôt que d’être vues en public avec leurs cheveux naturels.(…) L’afro n’est pas un déguisement, pour l’amour du ciel !Imaginez que Michèle Obama en ait assez de ses fers à défriser, décide de revenir à ses cheveux naturels et apparaisse à la télévision avec une masse de cheveux laineux, ou des boucles serrées.( …) Elle serait hallucinante, mais le pauvre Obama perdrait sûrement le vote des indépendants, et même des démocrates indécis.