Un jeune couple retrouve une vie professionnelle active et dynamique grâce à l’engagement d’une nounou qui s’occupe de leurs deux enfants en bas âge. Une relation de dépendance s’installe peu à peu entre les deux parties et dérange progressivement tant les parents que le lecteur qui sait… Et Louise s’incruste, fait tout pour se rendre indispensable. Sa vie jusqu’ici n’a pas été facile. Pour elle, le monde du jugement et du tribunal est loin de s’être limité aux palais de justice et aux toges noires ; avec son mari, à l’école de sa fille, en rue, devant son propriétaire, Louise, plus que d’autres, y a été confrontée. Et toujours condamnée. Chaque fois, « une colère de plus en plus noire l’envahissait.»
Effrayée à l’idée d’être congédiée les enfants devenus grands, Louise est tiraillée entre la haine qui la ronge et « l’intuition fugace, informe d’une vie qui va s’élargir, d’espaces plus grands, d’un amour plus pur, d’appétits voraces ». Elle est persuadée qu’un troisième enfant pourrait la sauver. Mais Louise est malade et son « âme pourrissante » lui fait commettre l’irréparable.
J’ai aimé :
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le style direct, concis et par là même percutant de cette auteure
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le regard sur le couple d’aujourd’hui avec ses choix et son mode de vie familial moderne
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Mais surtout, je ne peux refermer ce livre sans me poser des questions : sommes- nous conscients des mondes différents qui cohabitent jusque dans nos foyers ? Percevons-nous le vécu de gens tellement perdus, tellement isolés et pourtant à nos côtés ? Nos bulles, il est vrai, ne sont pas faciles à percer ni de l’intérieur ni de l’extérieur. Seul peut-être un vrai regard attentif et ouvert à l’autre permet d’entrevoir une détresse humaine. Et peut-être empêcher des drames. N’est-ce pas une des forces de l’écriture que de nous interpeller ?
Elle avait toujours refusé que ses enfants soient une entrave à sa réussite, à sa liberté. […] Cette prise de conscience l’ a plongée au début dans une profonde tristesse. (..)Elle s’était rendu compte qu’elle ne pourrait plus jamais vivre sans avoir le sentiment d’être incomplète, de faire mal les choses, de sacrifier un pan de sa vie au profit d’une autre.
Les jours d’abattements se succèdent à l’euphorie. Le monde parait se rétrécir, se rétracter, peser sur son corps d’un poids écrasant. Paul et Myriam ferment sur elle des portes qu’elle voudrait défoncer. Elle n’a qu’une envie : faire monde avec eux, trouver sa place, s’y loger, creuser une niche, un terrier, un coin chaud.
Myriam s’enfonce dans son fauteuil. Elle se demande où Louise va, si c’était bien elle et ce qu’elle faisait là. Elle aurait voulu l’observer encore à travers cette vitre, la regarder vivre. Le fait de la voir sur ce trottoir, par hasard, dans un lieu si éloigné de leurs habitudes, suscite en elle une curiosité violente. Pour la première fois, elle tente d’imaginer, charnellement tout ce qu’est Louise quand elle n’est pas avec eux.