Procès d’une femme dans un pays intégriste musulman (Afghanistan). Sa faute ? Avoir prononcé la prière du matin en la « revisitant » du haut du minaret à la place du muézin trop saoul pour se réveiller…. Ce qu’elle risque? La lapidation, enterrée jusqu’à la tête et criblée de pierres de plus en plus grosses pour assurer à « la folle » une mort lente et douloureuse….
Dans son roman puissant, S Azzedine dénonce la dérive grave et perverse d’un régime religieux en proie à des fondamentalistes qui estiment avoir eux seuls le pouvoir d’interpréter le Coran. Contre cette vision, Bilqiss se révolte : Le nom d’Allah a-t-il été déposé? Vous avez volé sa Parole et L’avez pris en otage pour faire de Lui la marionnette dont vous êtes le ventriloque….
Au- delà du thème de la place réservée à la femme dans le monde musulman, la réponse tantôt impertinente tantôt lucide que donne Bilqiss à son juge ou encore à la journaliste new-yorkaise venue l’interviewer aiguise notre regard critique de lecteur occidental sur l’Islam et sur nos bonnes intentions de sauveurs de ces pays du Mal.
J’ai aimé :
-
Ce roman à plusieurs voix, celle du juge ébranlé malgré lui par cette femme qu’il doit condamner, celle de Bilqiss fière et authentique dans ses convictions et celle de la jeune femme occidentale trop souvent naïvement convaincue du bien-fondé de sa vision féministe occidentale.
-
Etre moi aussi ébranlée dans mes certitudes de femme européenne
-
Le caractère frondeur de Bilqiss et sa liberté d’expression jusqu’au bout
-
L’humanité de chacun des personnages
Vous arrivez chez nous, trop belle, trop gaie, trop chanceuse. Je sais que vous êtes admirative de notre famille et que, une fois rentrée dans votre pays, vous direz à tout le monde que nous ne sommes pas tous des terroristes, qu’il y a des gens incroyables ici, mais cela ne changera rien à nos vies. N’essayez pas de vous faire aimer de nous, nous n’en avons pas les moyens.
Mon Coran n’ordonne rien, aucune loi ne peut s’en dégager parce qu(‘il y a autant de lecture qu’il y a de musulmans, et ce n’est certainement pas une bande de fripons en robe blanche rasés de frais qui réduira mon saint Coran à un vulgaire mode d’emploi pour décérébrés.
Les Occidentales ne savaient faire que cela : se gargariser de leur propre humanité. Léandra s’était jetée sur mon histoire pour l’écrire avec ses larmes teintées de mascara. Je refusais d’être une intermittente de leur spectacle. Le mien était insoutenable.